Le nombre de Français vivant à l’étranger a baissé de 5% en 20211. La crise sanitaire est en partie responsable des départs mais d’autres facteurs ont pu motiver les retours en France comme le Brexit par exemple. Alors que l’expatriation était plutôt prisée avant la pandémie, et que vous n’aviez pas ou peu besoin de faire des efforts pour trouver des candidats au départ, comment redonner à vos collaborateurs le goût des missions à l’étranger ? Je partage avec vous ici des idées issues des échanges avec mes clients expatriés.
Comment les expatriés français ont-ils vécu la crise en 2021?
D’après l’étude réalisée par l’Observatoire de l’expatriation Banque Transatlantique, en partenariat avec OpinionWay et l’UFE 2, “la crise sanitaire a été une expérience difficile pour la moitié des expatriés en 2021 : pour 38% elle a été assez difficile à vivre et pour 10% très difficile. 6% ont été contraints de rentrer en France du fait de la crise sanitaire et 2% d’entre eux ne sont pas repartis.”
Les expatriés ont dû faire face à de nombreuses difficultés. En plus des contraintes liées aux contextes sanitaires de chaque pays avec parfois des situations critiques (Inde, Brésil…), de nombreux expatriés ont été dans l’impossibilité de pouvoir rentrer temporairement en France sous peine de ne pas pouvoir revenir dans leur pays d’expatriation et par conséquent de ne pas honorer leur mission ou les responsabilités confiées. L’ensemble de ces contraintes ont entraîné des décisions difficiles à prendre pour les familles. Certaines ont fait le choix, à contre-cœur, de se séparer et de laisser le conjoint expatrié travailler dans le pays d’accueil. Cette option n’est pas sans conséquence quand on sait que le succès d’une expatriation réside aussi dans la capacité de la famille à se soutenir mutuellement.
Ainsi, la crise sanitaire pourrait rebattre les cartes de l’expatriation. Toujours d’après l’Observatoire de l’expatriation Banque Transatlantique, en partenariat avec OpinionWay et l’UFE 3 : “la moitié d’entre eux estime qu’elle remet en cause les projets d’expatriation (51%). De fait, un tiers des expatriés envisage de se réinstaller en France à terme, une proportion qui progresse de 6 points par rapport à avril 2020. 60% comptent rester dans leur pays actuel.”
En effet, le contexte actuel ne favorise pas les candidats au départ de crainte de rester bloqués une fois partis. Pourtant, l’expatriation continue d’être plébiscitée par ceux qui en ont fait l’expérience. Alors comment convaincre et “recruter” vos futurs expatriés ? Car même si vous privilégiez des contrats avec des profils locaux, il est compliqué de se passer d’expatriés dans certaines filiales.
Expatriation : des idées pour motiver les départs
Identifier les expatriés qui veulent poursuivre leur aventure
Parmi vos collaborateurs expatriés, la plupart d’entre eux veulent sûrement continuer à vivre cette expérience. Malheureusement, certaines entreprises les font revenir en France sans avoir pris véritablement leurs souhaits en considération, comme cela a pu arriver à l’un de mes clients :
“À l’issue de mon contrat d’expatriation, mon entreprise nous a fait revenir en France alors que nous étions prêts à repartir avec ma famille. Aujourd’hui, j’occupe un poste intermédiaire en attendant d’avoir une mission plus pérenne. Je trouve cela dommage car je sais que des collègues ont du mal à rentrer faute de trouver des remplaçants.” Alexandre T. Directeur de filiale dans l’industrie automobile.
“Les entreprises devraient davantage cerner les attentes des expatriés avant de les faire revenir. Et autant que possible, faites correspondre les profils des expatriés désireux de poursuivre leur aventure avec des postes ouverts ou avec des personnes qui sont à la recherche d’un remplaçant.” Thierry D, Head of business Development dans le secteur de l’énergie.
Élargir le vivier d’expatriés
Je pense qu’il est intéressant de viser de nouveaux candidats au départ. Si certains collaborateurs ont des problématiques familiales qui les empêchent de partir en expatriation ou de poursuivre leur carrière à l’étranger, une idée serait d’élargir les cibles vers des collaborateurs qui ont moins de contraintes personnelles : des profils plus jeunes ou au contraire plus seniors, tout dépend des situations de chacun.
Réapprendre à “vendre” l’expatriation en interne
Si auparavant, vous aviez besoin de faire moins d’efforts pour convaincre vos collaborateurs de partir à l’étranger, la donne semble avoir changé. Affûter les arguments pour expliquer les avantages qu’offre l’expatriation me semble clé. Par exemple, rappeler que :
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L’expatriation est un tremplin de carrière. En effet, l’expatriation reste encore une case à cocher pour accéder à de plus grandes responsabilités dans l’entreprise. Cette expérience permet, en général, aux collaborateurs de prendre des postes avec des enjeux plus importants.
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Évoluer à l’international leur permettra d’acquérir des compétences nouvelles et de vivre des expériences professionnelles qu’ils n’auront jamais l’occasion de connaître en restant en France.
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Travailler dans des pays différents, au sein de marchés dynamiques leur donnera de nouvelles perspectives.
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L’expatriation peut leur redonner de la motivation et un second souffle de carrière. Il s’agit d’une expérience professionnelle et personnelle intense et riche.
Dans le contexte actuel, prenez peut-être des mesures différentes pour rassurer ou inciter au départ
Des mesures logistiques
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Lorsque cela est possible, envisagez de fluidifier les allers/retours vers la France. Par exemple, ajoutez des billets d’avion offerts en supplément ; notamment pour ceux qui sont coupés de leur famille.
“J’ai vraiment apprécié que mon entreprise me propose deux allers/retours supplémentaires ces dernières années pour aller voir ma famille restée en France.” Hector V, DAF dans un groupe international en Russie.
Faire preuve d’empathie
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Communiquez le plus possible vis-à-vis de vos collaborateurs à l’étranger, gardez le contact avec eux, prenez de leurs nouvelles, intéressez-vous à eux. Faites-leur savoir toutes les mesures que l’entreprise a mises en place pour leur faciliter la vie dans le contexte actuel. Faites preuve d’attention.
“J’ai eu peu de communication et d’informations de la part de mon entreprise durant toute cette période covid. J’ai eu le sentiment d’être laissé pour compte au niveau personnel. C’est comme si l’entreprise nous avait envoyé le message suivant : débrouillez-vous !” Clément, Responsable Supply Chain, Asie.
Ajuster les critères d’évaluation
Le contexte rend les missions actuelles plus difficiles à mener à l’étranger. Par conséquent, vous ne pouvez pas évaluer vos collaborateurs comme d’habitude. Prendre les difficultés en compte ou réviser les critères d’évaluation seraient pertinents ; il est important de ne pas créer du ressentiment ou de la frustration.
Voici le témoignage de Bertrand C., Directeur Général en Afrique : “Notre vie personnelle a été particulièrement impactée par la pandémie en tant que famille expatriée. Nous avons eu des choix importants à faire compte tenu de notre vie à l’étranger. Séparé de ma famille, j’ai dû poursuivre mon travail seul dans des conditions loin d’être optimales. J’ai accumulé les difficultés personnelles et professionnelles. Pourtant, mon entreprise n’a pas pris en compte ma situation et m’a considérée uniquement sous le prisme des enjeux business. J’ai trouvé cela assez décevant et injuste.”
Actuellement, face à la pandémie et à des facteurs géopolitiques complexes, les expatriés expriment le besoin d’une attention particulière. Ils ont besoin de soutien ! Sans cela, il sera compliqué de continuer à trouver les profils dont vous avez besoin à l’international.
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